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— Enfin, ajouta-t-il, enfin, capitaine, tous morts ou hors de combat.

En écoutant cette héroïque narration, où l’intrépidité de Iago se révélait pour la première fois, le capitaine Massareo, qui connaissait parfaitement la lâcheté de son second, ne concevait rien à ce changement subit ; mais se rappelant la mâchoire de Samson, l’âne de Balaam, et tant d’autres miracles, il finit par regarder Iago comme un élu que Dieu avait tout à coup animé d’un souffle divin, pour lui donner la force de combattre un réprouvé, un fils de l’ange rebelle. Aussi, une fois qu’il eut adopté cette malheureuse idée, il crut aveuglément toutes les sottises et tous les mensonges qu’il plut à Iago de lui débiter.

— Et le Gitano ? demanda-t-il enfin.

— Le Gitano, capitaine, était probablement déguisé, mais je suis convaincu qu’il est au nombre des morts. Diable de sang, comme ça tache ! dit Iago, qui voulait sans doute détourner la conversation d’un sujet aussi délicat, et il s’interrompit pour essuyer une large trace sanglante qui sillonnait sa veste : c’était encore une suite de l’agonie du pauvre quadrupède.