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— Pourquoi cacherais-je ses crimes ? Mon indulgence n’a-t-elle pas été une faiblesse coupable ? Je dois en porter la peine. Nous étions allés passer l’été à Trieste. Depuis plusieurs jours, Paula se montrait d’une humeur sombre, irritable ; je la voyais à peine. Lors de ces accès de noire tristesse, elle ne voulait auprès d’elle qu’une jeune bohémienne qu’elle avait recueillie par charité. Cette pauvre enfant était, par reconnaissance, tendrement dévouée à ma femme.

Pour l’intelligence du récit qui va suivre — continua le prince — il me faut entrer dans quelques particularités minutieuses. Au bout du jardin de notre maison de Trieste était un pavillon où nous allions prendre le thé presque chaque soir. Un soir Paula m’avait à grand’peine promis d’y venir passer une heure… J’espérais ainsi la distraire de ses tristes pensées.

Jamais je n’oublierai l’expression morne et désolée de sa physionomie pendant cette soirée ; elle accueillit presque avec colère et dédain quelques mots de tendresse que je lui adressais.

Douloureusement blessé de sa dureté, je sortis du pavillon.

Après quelques tours de jardin, je me calmai peu à peu, me rappelant que Paula m’avait prévenu qu’elle était encore quelquefois sous le coup de souvenirs pénibles. Je rentrai dans le pavillon. Elle n’y était plus. On avait servi le thé pendant mon absence, je trouvai préparée la tasse de lait