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— Vous l’exigez… monsieur… je vous obéirai…

— C’est, en vérité, bien heureux, madame…

— Seulement… rappelez-vous toujours… que j’ai de toutes mes forces résisté à vos ordres… que je vous ai conjuré, supplié de me laisser vivre dans la retraite… et que c’est vous… vous qui avez voulu m’en tirer, pour me jeter au milieu du tourbillon du monde… — dit Berthe en s’animant ; — du monde… où je n’aurai ni appui ni conseil, où je serai exposée à tous les dangers qui assiègent une jeune femme absolument isolée…

— Isolée !… mais moi, madame…

— Écoutez-moi, monsieur : j’ai vingt-deux ans à peine… vous m’avez accablée de chagrins… je ne vous aime plus… Je suis sans doute résolue de ne jamais oublier mes devoirs… mais quoique sûre de moi… je préférerais ne pas affronter certains périls.

Berthe, cette fois, croyait avoir frappé juste en éveillant vaguement la jalousie forcenée de M. de Brévannes : elle espérait ainsi le faire réfléchir aux inconvénients de jeter au milieu des séductions du monde une jeune femme sans amour et sans confiance pour son mari.

En effet, M. de Brévannes, stupéfait de ce nouveau langage, regardait Berthe avec une irritation mêlée de surprise.

— Qu’est-ce à dire, madame ? — s’écria-t-il. — Voulez-vous me faire entendre que vous pourriez avoir l’indignité d’oublier ce que j’ai fait pour