Page:Sue - Paula Monti, tome 1, 1845.djvu/103

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sur un glaive du plus beau temps de la renaissance ; de l’autre main il tenait un luth d’ivoire à sept cordes, dont la base reposait sur la rotule ; par un caprice bizarre, une couronne de roses (rareté pour la saison) d’une fraîcheur et d’un parfum adorables surmontait ce luth ; un manteau de drap blanc, constellé d’X et d’M entrelacés, brodés en rouge, se drapait en plis majestueux sur la cage obscure de la poitrine du squelette, et ne laissait voir que l’extrémité du tibia et du pied droit. Ce pied, d’une petitesse remarquable, était (amère dérision !) chaussé d’un soulier de satin blanc, dont les cothurnes de soie flottaient en longue rosette sur l’os de la jambe, poli comme l’ivoire.

Si l’œil, s’habituant aux ténèbres, pouvait percevoir certains détails, on remarquait sur ces cothurnes de soie et sur ce soulier de satin quelques taches d’un brun rougeâtre… que l’on reconnaissait facilement pour des traces de sang.

Ce singulier objet de curiosité était posé sur un socle d’ébène merveilleusement rehaussé de bas-reliefs et d’incrustations d’argent et d’ivoire.

Par un étrange contraste, car là tout était contraste, les ornements de ce piédestal ne participaient en rien de la tristesse de l’ossuaire qu’il supportait ; tout ce que l’art florentin du XVe siècle a de plus gracieux, de plus pur et de plus charmant, semblait revivre dans ce délicieux ouvrage, véritable chef-d’œuvre de ciselure et de sculpture. Néanmoins ces ornements enchanteurs n’étaient pas