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vous n’êtes plus seule dans la vie, Mathilde ; le soin de votre bonheur m’appartient, c’est à moi de veiller sur mon bien, sur ma femme, et je vous défendrai contre vous-même. On m’accorde assez de perspicacité… avant vingt-quatre heures, ma pauvre Mathilde, votre secret sera découvert.

J’étais à la fois ravie jusqu’aux larmes et épouvantée de me voir ainsi devinée. À tout prix cependant il fallait absolument détacher M. de Rochegune de moi, lui ôter tout espoir, surtout l’empêcher de croire que je me dévouais pour quelqu’un.

Si j’avais seulement attribué aux convenances, à la pitié, mon rapprochement de M. de Lancry, M. de Rochegune se serait toujours cru aimé de moi, et aurait rendu plus impossible encore mon dessein de le marier à Emma.

Il fallait donc que j’eusse le courage de feindre un amour passionné pour M. de Lancry, afin d’ôter à M. de Rochegune toute illusion sur moi.

Ma position était à la fois si cruelle et si difficile, parce qu’il s’agissait aussi d’Emma, de