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La nuit était complètement venue.

— Dites donc, monsieur Servien, prenez garde qu’elle ne vous dévore quand vous allez lui servir son potage — dit mademoiselle Julie en riant et en ouvrant la porte.

L’intérieur de cette chambre était toujours ainsi qu’il a été décrit par madame de Lancry dans ses mémoires.

Sur la cheminée, des pagodes de porcelaine verte à yeux rouges toujours en mouvement ; sur le secrétaire de vieux laque, trois générations de chiens-loups blancs empaillés : de graves portraits de personnages des siècles passés se détachaient des boiseries grises.

À la faible clarté que projeta dans cette vaste chambre la bougie que portait mademoiselle Julie, on put voir se détacher du fond de l’alcôve, drapée de damas rouge sombre, la figure jaune et terreuse de mademoiselle de Maran assise dans son lit et adossée à un énorme coussin.

C’était toujours la même robe de soie carmélite, le même manteau de lit, le même tour de cheveux noirs couvrant à demi son front plat et déprimé comme celui d’une vipère ;