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vir sa vengeance, jurer de ne jamais pardonner à Ursule…

— Mais c’est un enfer que votre vie alors !…

— Eh bien ! oui… oui, c’est un enfer… Devant ma mère je me contrains ; mais je souffre le martyre… D’autres fois je me maudis de rester insensible aux consolations qu’elle tâche de me donner… je sens tout le chagrin que je lui fais ; mais je n’y puis rien… tant je suis faible, tant je suis lâche… Un enfer… vous l’avez dit… c’est un enfer… Et pourtant ma pauvre mère est la meilleure des femmes ! et pourtant, moi, je ne suis pas un méchant homme… Je l’aime… je l’aime bien tendrement ; et pourtant je sens que je l’afflige, que je la blesse sans cesse… Oh ! tenez, maudit soit le sort qui m’a fait rencontrer Ursule… J’aurais épousé une femme de ma classe ; ma vie, celle de ma bonne mère n’eussent pas été empoisonnées… Si vous saviez quelle existence je mène, mon Dieu !… si vous saviez ! Je n’ai plus le moindre souci de mes affaires d’intérêt, je ne sais où en est ma fortune ; j’ai pris un homme d’affaires pour n’avoir plus à y songer… À quoi bon l’argent maintenant !