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— Je n’ai pas encore tué votre mari… Je dois vous paraître bien lâche, n’est ce pas ?… Mais patience… patience — ajouta-t-il d’un air sombre et concentré — ma pauvre vieille mère mourra un jour…

Et il recommença de marcher en silence.

Ces mots m’expliquèrent la conduite de M. Sécherin. Malgré sa bonhomie, il avait fait ses preuves de courage. Il attendait sans doute la mort de sa mère pour exiger une sanglante réparation. Je n’aimais plus M. de Lancry, mais l’idée de ce duel me fit horreur. Je répondis à mon cousin :

— Votre mère vivra assez longtemps pour que vos regrets soient tellement affaiblis… que vous laissiez à Dieu la punition des coupables.

M. Sécherin partit d’un éclat de rire sauvage en s’écriant :

— Abandonner ma vengeance à Dieu !! — Et il reprit à voix basse, d’un ton qui me fit frissonner : Mais vous ne savez donc pas que je trouve quelquefois… que ma mère vit bien longtemps pour ma vengeance !