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Le cœur me battait si fort que je restai immobile à la porte du salon.

Examinant plus attentivement la figure pâle et austère de madame Sécherin, je fus étonnée de l’innombrable quantité de rides profondes que le chagrin avait creusées sur ses traits. Par deux fois, le mouvement mesuré de son rouet se ralentit peu à peu comme le pendule d’une horloge qui s’arrête graduellement, elle pencha légèrement sa tête sur sa poitrine ; ses yeux fixes et éraillés regardaient sans voir ; une de ces larmes si rares chez les vieillards, mouilla sa paupière ardente et rougie ; puis, faisant un brusque mouvement comme si elle se fût éveillée en sursaut, et voulant échapper sans doute à de sinistres réflexions, elle se remit à tourner son rouet avec une vivacité fébrile.

Pour ne pas rester plus longtemps inaperçue, j’agitai la clef dans la serrure.

Madame Sécherin releva la tête, me vit, repoussa du pied son rouet bien loin d’elle et me tendit les bras sans me dire une parole.

Je baisai ses mains vénérables, et je m’assis près d’elle.