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à son insu, mon auxiliaire dans la lutte suprême que je voulais tenter.

— Je ne vous aime pas ? — lui dis-je. — Pouvez-vous me faire ce cruel reproche ! N’est-ce pas parce que je vous aime tendrement que j’ai le courage de vous épargner, ainsi qu’à moi, des remords éternels !

Il se leva et se mit à marcher avec agitation en essuyant ses yeux.

Je fus mise encore à une rude épreuve ; quelques boucles de sa chevelure s’étant dérangées, je vis à son front la cicatrice de la blessure qu’il avait autrefois reçue en venant savoir de mes nouvelles, lorsqu’il était tombé dans un guet-apens que lui avait tendu M. Lugarto.

La vue de cette cicatrice, en me rappelant depuis combien d’années durait le dévouement de M. de Rochegune, fit que ma résolution de lui cacher ce que j’éprouvais me devint plus pénible encore.

Il s’arrêta tout à coup devant moi et me dit :

— Mathilde, croyez-vous qu’il me soit possible de cacher aux yeux de nos amis les émotions qui m’agitent ?