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devais renoncer à aimer… autant par solidité de principes que par impuissance de cœur. Je vis au contraire, dans ces froides impossibilités, la garantie de mon bonheur futur.

Depuis mon retour à Paris, je me trouvais parfaitement heureuse. La société restreinte et choisie dans laquelle je vivais me comblait de soins, de prévenances. J’avais à aimer madame de Richeville, Emma ; j’avais donc, si cela se peut dire, assez d’occupation de cœur pour ne pas regretter l’absence de sentiments plus vifs.

J’ai oublié de dire que, restant chez moi presque toutes les matinées, je recevais assez souvent les amis de madame de Richeville, qui étaient devenus les miens. Ainsi, dans mes habitudes, la visite de M. de Rochegune n’était nullement un accident.

Je l’attendis avec impatience.

Il vint, je crois, le surlendemain du jour où je l’avais revu pour la première fois. J’étais seule ; il me tendit la main et me dit tristement :

— Je n’ai pu avant-hier vous parler de notre malheureux ami, quoique nous fussions