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trouvait seul au milieu d’une steppe immense et solitaire, que la lune éclairait de sa pâle clarté ; la neige tombait lentement ; il était déjà à moitié enseveli sous une couche glacée, lorsqu’il sortit de son évanouissement.

— C’est affreux — dit madame de Richeville. — Ce désert couvert de neige lui fit l’effet d’un immense linceul… M. de Rochegune m’a dit que telle fut la première réflexion qui lui vint, car il m’a déjà raconté cette circonstance en m’apprenant comment il avait été blessé, mais en me cachant la suite de cette aventure romanesque.

— Je le crois bien — dit la princesse ; — elle était trop honorable pour lui.

— Et je l’ai sue, moi — dit le prince — pas plus tard qu’hier, par un aide-de-camp de l’empereur. Cet officier a fait cette guerre avec Rochegune, et c’est de lui que je tiens tous ces détails. Notre ami se trouva donc seul, la nuit, au milieu d’une solitude profonde, paralysé par le froid et par sa blessure, et ayant à peine la force de se débarrasser de la neige qui s’amoncelait sur lui ; enfin il entendit au loin le sourd piétinement d’une troupe de cavalerie ;