Page:Sue - Mathilde, tome 5.djvu/101

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ma joie insensée, délirante, lorsqu’Ursule daigne être pour moi une femme et non pas un démon insolent et moqueur.

« Tantôt encore elle sait me persuader ou plutôt je me persuade que, malgré tous ses désolants caprices, Ursule m’aime ardemment, et que sa conduite bizarre est calculée pour me tromper sur l’amour qu’elle a pour moi ; amour dont son orgueil se révolte. Tantôt je crois que c’est pour conserver plus longtemps mon cœur, qu’elle feint l’inconstance et le dédain, parce qu’elle sait que la satiété me viendrait peut-être si je n’avais plus d’inquiétude sur la sincérité de son affection… Je vois alors une preuve de violente passion dans ce qui d’autres fois me révolte et m’indigne.

« Enfin, dans mes jours de soupçons, je me figure qu’elle ne m’aime pas, qu’elle me tolère parce que je trouve le moyen de flatter ses goûts et ses penchants.

« N’est-ce pas que c’est affreux ? Oh ! la misérable ! elle sait bien que ce sont ces doutes irritants qui font sa force, elle le sait bien !

« Si je me croyais ingénument, stupidement aimé comme je l’ai été par ma femme et par