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Maintenant que toute illusion est à jamais dissipée pour moi et que je vois vrai dans le passé… je m’aperçois que même au milieu des chagrins que je croyais les plus désespérés, un secret et vague espoir me soutenait encore à mon insu. L’abandon de Gontran me fit sentir tout ce que sa présence était pour moi.

En vain je savais qu’il aimait Ursule, en vain il m’avouait cette folle et irrésistible passion… au moins il était là… près de moi ; je pouvais compter, grâce à mes soins, grâce à ma tendresse, sur un bon retour de son cœur… et puis enfin, encore une fois, si cruel, si impitoyable qu’il fût… il était là, et mieux vaut souffrir par la présence que par l’absence.

Un remords terrible, implacable, me poursuivra désormais toute ma vie… Un indigne amour m’a coûté la vie de mon enfant…

Si, comme le disaient mes lèvres menteuses, oubliant, méprisant un homme sans foi, j’avais mis tout mon avenir dans l’amour maternel, j’aurais supporté le délaissement de cet homme avec calme et dignité…

Il n’en fut pas ainsi. En me causant un atroce déchirement, le départ de cet homme me prouva