Page:Sue - Mathilde, tome 1.djvu/97

Cette page a été validée par deux contributeurs.

catastrophe, je suis tombée à genoux ; j’ai prié pour elle, j’ai surtout prié pour vous… vous lui surviviez.

« Je n’ai pas un instant alors songé à vous écrire, à vous voir… Il est de ces malheurs que la vanité des consolations irrite et exaspère encore.

« Vous avez tout quitté pour venir près des restes chéris d’Emma mener une vie froide et muette comme sa tombe.

« C’est une chose à la fois étrange et magnifique, mon ami, que de voir combien les grands caractères, grands par le courage, grands par le cœur, prévoient sûrement ce qu’ils doivent ressentir.

« Il y a trois ans, Emma vous disait : « Si vous me perdiez, que deviendriez-vous ? » Je vous entends encore, mon ami, lui répondre avec ce sourire qui n’appartient qu’à vous et sans cacher les larmes qui vous vinrent aux yeux : — « J’irais où vous seriez je vivrais dans l’isolement… je ne me consolerais jamais… Peut-être n’aurais-je pas le courage de revoir Mathilde… notre amie… notre sœur… »