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amour pour M. de Lancry devait augmenter ; je voulus vous écrire, je craignis que votre tante n’interceptât ma lettre, j’étais au désespoir en songeant que peut-être, prévenue à temps, vous n’auriez pas engagé votre avenir… je vous porte tant d’intérêt !… Que cette pensée m’était cruelle !… Mais hélas ! je le vois à votre froideur, Mathilde, je ne vous convaincs pas ; dans votre défiance vous vous demandez toujours la cause de cet intérêt si puissant que je vous porte. Mon Dieu, faut-il vous répéter encore qu’en tâchant de vous sauver je m’acquitte envers M. de Mortagne ?

— Et vous vous vengez de M. de Lancry, Madame ! — dis-je avec amertume.

— Je me venge, Mathilde ? — reprit doucement la duchesse. — Faut-il donc être absolument conduite par un tel motif pour vous prendre en affectueuse pitié ? Le cœur ne se brisera-t-il pas de douleur en vous voyant, pauvre petite, si jeune, si intéressante, abandonnée, perdue au milieu de ces méchants égoïstes, devenir à la fin victime de la haine de votre tante et de la cupidité de M. de Lancry ?