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la colère, mais la pitié. Lorsque je rencontrai M. de Lancry à l’ambassade, je le revoyais pour la première fois depuis qu’il m’avait si bassement sacrifiée. Malgré son assurance, il fut embarrassé… Je n’éprouvai rien… rien que le désir de lui prouver mon mépris en l’accueillant avec autant d’apparente affabilité que si je me trouvais avec lui dans les termes de familiarité autorisée par une ancienne amitié… ma vengeance n’allait pas au-delà. Mais pour un homme du caractère de M. de Lancry, et en général pour tous les hommes… rien n’est plus blessant, plus cruel, que de voir sourire indifféremment la victime qu’ils ont voulu frapper à mort… Je vous ai dit avec quel intérêt M. de Mortagne m’avait parlé de vous, je vous regardais avec une affectueuse curiosité lorsque mademoiselle de Maran m’interpella pour me dire quelques paroles sanglantes dont vous n’avez pu comprendre le sens détourné. J’eus assez d’empire sur moi pour ne lui répondre que par un fait qui devait la frapper presque de frayeur… l’arrivée de M. de Mortagne, que je savais d’une manière certaine ; il a été la victime d’une