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même qu’il était plus que jamais attaché à madame de Richeville.

Alors ces mots qu’elle m’avait dits à l’Opéra avec un accent si affectueux : — Prenez garde, pauvre enfant ! — ces mots me revenaient à la pensée. Dans mon découragement, je n’avais plus la force de haïr cette femme. J’interprétais ces paroles comme si elle m’eût dit : « Prenez garde, pauvre enfant, on veut vous marier à Gontran, vous n’avez rien de ce qu’il faut pour lui plaire, et vous souffrirez d’un amour que vous ressentirez seule. »

Lorsqu’au contraire ma confiance renaissait, je voyais dans ces mots de la duchesse une sorte de menace déguisée, une sorte de défense de prétendre à un cœur qu’elle possédait.

J’étais d’autant plus accablée par ces différentes pensées, que je ne pouvais les confier à personne. Mon tuteur, M. d’Orbeval, avait rappelé Ursule près de lui pendant quelque temps. Notre séparation, quoiqu’elle dût être de très courte durée, n’en avait pas été moins pénible. Dans ce moment, surtout, l’absence de ma cousine m’était doublement cruelle.