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mières émotions qu’on rêve toujours si sereines et si douces.

Et puis d’ailleurs, je pensais qu’il me fallait peut-être lutter de toutes mes forces contre ce sentiment, s’il naissait en moi ; il pouvait me rendre la plus malheureuse des femmes ; car M. de Lancry ne le partagerait peut-être pas, ou, s’il le partageait, ses vues devaient peut-être déplaire à sa famille ou à la mienne.

Au milieu de ces préoccupations si graves pour une pauvre tête de dix-sept ans, je regrettais surtout la présence de mon seul ami, de M. de Mortagne, en qui j’avais une confiance instinctive. Malheureusement les dernières paroles de mademoiselle de Maran firent évanouir les espérances que madame de Richeville avait éveillées en moi en m’annonçant le prochain retour de mon ancien protecteur.

Abandonnée au cours de ces réflexions, bien résolue à épier les moindres mouvements de mon cœur, j’attendis avec une sorte d’anxiété cette soirée, pendant laquelle je reverrais sans doute M. de Lancry pour la seconde fois.

Nous arrivâmes assez tard à l’Opéra ; la