Page:Sue - Mathilde, tome 1.djvu/173

Cette page a été validée par deux contributeurs.

cheveux blonds ! que je les baise encore une fois. — Et je sentis sur mon front ses lèvres glacées.

J’avais jusqu’alors fermé les yeux, quoique éveillée. Tout à coup je regardai ; je vis ma gouvernante aller vers la fenêtre et l’ouvrir violemment ; je devinai sa funeste pensée ; je courus vers elle, et je l’arrêtai au moment où elle allait se jeter par la fenêtre.

La pauvre femme resta stupéfaite ; mes cris la rappelèrent à elle-même ; elle tomba agenouillée, et s’écria : — Qu’allais-je faire ? Seigneur mon Dieu, pardonnez-moi, j’étais folle ; j’oubliais que j’avais juré à ta mère mourante de ne pas t’abandonner ; mais je souffrais tant… aujourd’hui surtout ; c’est le bon Dieu qui m’a envoyé cet ange pour m’empêcher de commettre un crime. Non, non, je resterai près de toi, mon enfant ; je souffrirai, j’endurerai tout, je mourrai, s’il le faut, de chagrin, mais je mourrai près de toi, en te regardant ; je l’ai promis à cette pauvre madame qui est dans le ciel et qui m’entend.

Cette scène me laissa une impression si profonde, je fus si frappée du désespoir de Blondeau, que mes premiers germes d’ingratitude