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m’avait dit, en me parlant des étrennes de Blondeau : « Au lieu de lui donner quelque robe ou quelque bijou, il faudra lui donner de l’argent. Ces gens-là aiment mieux l’argent que tout ; » et elle me remit cinq louis pour elle.

Les années précédentes jamais ma tante ne m’avait rien donné pour ma gouvernante ; comme j’aimais alors tendrement celle-ci, et que je tenais à lui offrir quelque chose, chaque année je faisais des prodiges de dissimulation et d’adresse pour parvenir à écrire à son insu quelques lignes d’une tendresse naïve, et pour lui broder de mon mieux quelque petit morceau de tapisserie.

Il est impossible de se figurer la joie, le ravissement de madame Blondeau, lorsque la veille du nouvel an, me jetant à son cou, après ma prière du soir, je lui apportais cette offrande.

Maintenant que j’y songe, il me semble qu’il y avait quelque chose de touchant, de religieux, dans cette marque de mon affection, pauvre orpheline, abandonnée, rebutée, qui, ne possédant rien, recourais à mon travail en-