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avec qui toutes les sommités sont presque obligées de compter.

Les enfants sont surtout frappés des apparences ; ils ne peuvent se rendre raison de la puissance de l’esprit et de l’intrigue : aussi pendant bien longtemps il me fut impossible de comprendre comment mademoiselle de Maran, malgré son apparence chétive, presque grotesque, exerçait autant d’empire sur des personnes qui n’étaient pas forcément sous sa dépendance.

Lorsque ma tante était assise, sa tête presque de niveau avec son épaule gauche, infiniment plus haute que la droite, ne dépassait pas le dossier d’un fauteuil ordinaire ; ses longs pieds toujours chaussés de souliers de castor noir reposaient sur un carreau très élevé qu’elle partageait avec Félix.

Pourtant, malgré sa laideur, malgré sa méchanceté, mademoiselle de Maran réunissait chaque soir autour d’elle l’élite de la meilleure compagnie de Paris, et gourmandait avec hauteur les personnes qui demeuraient quelques jours sans venir la voir. Ses reproches aigres et durs, témoignaient assez qu’elle ne tenait