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Elle le dominait d’ailleurs complètement par la hauteur et par la fermeté de son caractère. Il ne faisait rien sans la consulter. Elle lui donnait toujours des avis remplis de prévoyance, de finesse et d’habileté. Haïssant Napoléon autant que la révolution, connaissant intimement plusieurs membres du cabinet anglais, pressentant la chute de l’empire, vers 1812, elle avait engagé mon père à aller habiter près d’Hartwell et faire assidûment sa cour à Louis XVIII.

Elle-même vit souvent le roi, et lui plut par la vivacité caustique de son esprit, par la sûreté de son jugement et par la liberté de ses discours. Sachant le latin à merveille, elle faisait à ce prince des citations pleines d’à-propos et d’une flatterie d’autant plus délicate, qu’elle se cachait sous les dehors d’une brusquerie presque cynique.

Déliée, adroite, pénétrante, redoutée par sa méchanceté sarcastique qui, ne craignant rien, s’attaquait à tout, mademoiselle de Maran se faisait une arme ou une défense de sa laideur, de sa difformité, de sa faiblesse, pour braver les hommes et les femmes. Elle