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bien vite les premières tendances de M. Duriveau. Il resta fastueux, mais il devint cupide ; puis il ne lui suffit plus d’être riche, il voulut devenir noble,… comme tant d’autres. Son mariage avec la fille d’un duc de l’Empire rallié à la restauration l’affubla d’un titre de comte, et Adolphe Duriveau, le fils du père Duriveau, l’aubergiste usurier, le spoliateur indigne, se crut comte et s’appela très-sérieusement le comte Duriveau. Sa femme, morte fort jeune, lui laissa un fils, Scipion, vicomte Duriveau, s’il vous plaît.

Le bonheur, ou plutôt l’orgueil d’Adolphe Duriveau s’était concentré, résumé dans ces deux belles choses : — être un des grands propriétaires de France, — et se faire appeler Monsieur le comte par son laquais, ses fournisseurs et ses fermiers ; plus tard une velléité d’ambition politique (nous en expliquerons la cause) se joignit à ses vanités.

Archi-millionnaire et comte, il ne rêva pas d’autre avenir, d’autre félicité possible pour son fils. Et peut-être encore plus glorieux vain que cupide, il vit, dans cet enfant, un nouveau moyen d’étaler et de faire envier son opulence. À quinze ans, Scipion Duriveau, d’une figure ravissante, d’une intelligence précoce, élevé par un gouverneur de grande maison… c’est tout dire, devint un nouvel aliment pour l’orgueil de son père, tout glorieux de produire ce trésor de gentillesse et d’impertinence.

Il existait alors dans la très-bonne compagnie de Paris ce qu’on appelait les jeunes pères.

C’étaient de plus ou moins jeunes veufs, gens d’esprit et de plaisirs, beaux joueurs, gais viveurs, et que tu-