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elle s’offrit à faire des armes avec les premiers maîtres de la garnison, enleva des poids énormes avec ses dents, etc.

Lorsqu’elle entra dans ma chambre, la mère Major était en costume de travail, car en ordonnant à Bamboche de cramper en cerceau (c’est-à-dire, étant debout, de se renverser en arrière, pour que la tête allât presque toucher aux talons), cette femme répétait un exercice avec l’enfant.

Le costume de la géante se composait d’un maillot éraillé, rapiécé en vingt endroits, autrefois de couleur saumon ; ce vêtement dessinait ses jambes d’Hercule et ses genoux raboteux comme le nœud d’un chêne ; une manière de courte tunique, faite d’un restant de jupon noirâtre et graisseux, lui ceignait les reins, tandis qu’un vieux châle rouge, croisé sur sa poitrine monstrueuse, s’attachait derrière son dos. Enfin pour compléter son aspect viril, ses cheveux, noirs, épais, drus comme du crin, étaient coupés à la Titus.

Telle était la mère Major, lorsqu’elle m’apparut pour la première fois, tenant à la main un formidable martinet à plusieurs lanières.

— Arrive donc, mère Major, — dit la Levrasse à la femme géante ; — voici le petit Martin qui n’a pas de maman et qui en demande. N’est-ce pas que tu seras la sienne ?

— Un peu,… — répondit la mère Major de sa grosse voix.

Et, s’approchant de moi, elle me prit entre ses bras, comme elle eût pris un enfant au maillot, et me déposa