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fagots de peuplier remplissant la cheminée, éclairait ce réduit de leur chaude et joyeuse clarté.

— Voilà ton gîte, ton souper et ton lit, — me dit la Levrasse, en me montrant du doigt une caisse remplie de paille de maïs et une escabelle, sur laquelle était un morceau de pain, un morceau de lard et un cruchon de bière.

— Maintenant, — ajouta-t-il en me pinçant l’oreille d’un air paterne : — bon appétit et bonne nuit, petit Martin.

Puis, la Levrasse sortit de la chambre et ferma la porte à double tour.

Resté seul, et réchauffé par l’ardeur du brasier, je commençai à reprendre mes esprits, car jusqu’alors j’avais cru rêver.

Bientôt je regardai autour de moi avec un mélange de frayeur et de curiosité ; les fagots de peuplier, mêlés de sarments de vigne, pétillaient dans le foyer en mille jets de flamme bleue et blanche, et épandaient par bouffées leur odeur aromatique et salubre. Cette gaie lumière suffisait à éclairer les murailles nues et blanches de cette chambre.

Ayant par hasard levé les yeux vers le plafond, je m’aperçus seulement alors que, des solives saillantes, pendaient soigneusement étalées, lissées et étiquetées, un grand nombre de longues chevelures de toutes couleurs, blondes, brunes, châtaines et même rousses ; il en était de si épaisses, de si luisantes, qu’on eût dit d’énormes écheveaux de soie.

Ce spectacle étrange me remplit d’un nouvel effroi ; je m’imaginais que ces chevelures avaient appartenu à