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— Oui, il voulait monter ici pour noter nos meubles… mais je l’ai tant prié de ne pas te réveiller qu’il a écrit nos meubles comme je lui ai dit, et il s’en est retourné.

— C’est donc fini, c’est donc fini, — murmura le métayer en gémissant, — plus rien… Qu’est-ce que nous allons devenir ?

— Hélas ! mon Dieu ! je ne sais pas, mon pauvre homme.

— Et si faible… les fièvres m’ont miné. Ah ! c’est de ma faute aussi… c’est de ma faute !

— Ta faute ?

— Oui, quand, l’an passé, voyant les belles récoltes que j’avais eues, en écoutant les bons conseils de cette pauvre petite Bruyère, le régisseur de M. le comte m’a demandé un pot de vin et une augmentation, parce que mon bail était fini, je n’aurais pas dû renouveler à ce prix-là ;… c’était notre ruine, car, avant, c’est tout au plus, si nous pouvions joindre les deux bouts ;… sans mettre seulement un sou de côté pour nous ; et pour une belle récolte que nous avons eue, grâce à Bruyère, nous en avons eu tant et tant de mauvaises, faute d’argent pour bien cultiver. Aussi, dans le pot de vin a passé le profit de cette belle récolte, et celle de cette année, quoique belle aussi, nous laisse en arrière de deux termes, parce que maintenant le bail est trop cher. Ah ! feu mon père avait bien raison de dire : — N’améliore jamais ta culture, mon pauvre gars, car, s’il le peut, ton propriétaire t’augmentera du double de ce que cette amélioration te rapportera

— Il faut que M. le comte ait bien besoin, bien besoin