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Non loin de la cheminée on voyait une huche à pain vermoulue, et au-dessus, sur une planche moisie, quelques poteries égueulées ; à cela faisait face une grande armoire de noyer ; enfin, au plus profond de la chambre se dressait un lit d’une énorme hauteur composé d’une paillasse, épaisse de trois pieds et d’un mince matelas de laine brute ; un banc de bois, une table boiteuse, quelques escabeaux composaient l’ameublement de ce logis, faiblement éclairé par une chandelle placée dans une vieille lanterne treillissée de fer, car il faisait nuit.

Telle était la demeure de maître Chervin,… le fermier du riche comte Duriveau, telle est généralement la demeure des fermiers de Sologne. Le métayer sembla dormir, tandis que sa femme, agenouillée devant le feu, tâchait de le faire flamber en soufflant de toutes ses forces sur les tisons fumants. N’y pouvant parvenir, elle s’accroupit devant le foyer, le menton sur les genoux, tournant de temps en temps la tête du côté du lit, où sommeillait son mari.

Soudain maître Chervin poussa un long et douloureux gémissement en se retournant sur sa couche humide et dure. Il avait soixante ans environ, une physionomie honnête et douce ; son teint était pâle et plombé, ses yeux creux, ses lèvres blanches ; sa barbe grise, non coupée depuis long-temps, pointait rude et drue sous sa peau rugueuse.

Sa femme l’entendant se plaindre et s’agiter, courut à son lit et lui dit :

— Tu ne dors donc pas, mon pauvre homme ?

— Hélas ! mon Dieu ! la mère,… je rêvais du Monsieur du roi. Est-il parti ?