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L’huissier parti, la femme du métayer avait remonté l’escalier composé de pierres disjointes qui conduisaient au logement de maître Chervin.

Dans cette chambre, assez vaste, au plafond très-bas, quelques claies suspendues à des solives noircies par la fumée, supportaient deux rangées de fromages aigres et rances, tandis qu’à l’autre extrémité, le plafond effondré laissait apercevoir, à travers d’épaisses toiles d’araignées, le foin dont le grenier était rempli.

Durant le jour, la lumière ne pénétrait dans cette pièce obscure que par le panneau supérieur de la porte, panneau mobile, mais dégarni de vitres. La nuit on fermait un volet. Les murs, çà et là crevassés, étaient enduits d’une crasse humide d’un brun bistré ; le sol inégal et seulement composé de terre battue, suintait l’eau en quelques endroits.

D’un côté de cette chambre on voyait une haute cheminée, si toutefois l’on peut donner le nom de cheminée à un large tuyau maçonné en briques à quatre ou cinq pieds du sol, en saillie du mur, et au-dessus d’un âtre composé d’une grande pierre sur laquelle on faisait le feu comme dans une hutte de sauvage ; de sorte qu’à la moindre bouffée de vent la fumée se rabattait en tourbillonnant dans cette pièce déjà si malsaine.

Ce soir-là, afin de conjurer un peu le froid humide qui, en pénétrant de l’automne, envahissait la chambre, on avait placé dans l’âtre, du côté de leurs cimes, et croisés l’un sur l’autre, deux petits sapins morts, dont les racines terreuses s’étendaient jusqu’à la moitié de la chambre ; ce bois, encore vert, au lieu de brûler, se charbonnait et répandait une fumée âcre et noire.