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tatouages, ces mots écrits sur la poitrine, à l’endroit du cœur :

Amour éternel à Basquine.

Le comte donna ce papier à son fils.

— Lisez… et vous verrez que cette infâme a été la maîtresse d’un assassin… du bandit que l’on traquait ce matin dans ces bois.

Scipion lut le papier, le remit au comte, et répondit froidement :

— Qu’est-ce que cela prouve ? que c’est peut-être pour elle que cet homme est devenu bandit et assassin… Ça ne m’étonne pas.

— Mais moi, Monsieur, cela m’épouvante pour vous, — s’écria le comte en se redressant de toute sa hauteur, le regard menaçant, le geste impérieux, l’attitude énergiquement décidée.

Et comme un sourire de persiflage errait sur les lèvres de Scipion, le comte s’écria :

— Oh ! il n’y a plus à railler, à parler de Géronte et d’Orgon ! j’ai été faible, imprudent, lâche, criminel, oui, criminel ; car je vous ai laissé impunément souffleter sur ma joue la dignité paternelle : mais c’est assez, je vous dis, moi, que c’est assez, entendez-vous ? — s’écria le comte, effrayant d’indomptable résolution. — Il ne s’agit plus maintenant de roueries insolentes ou infâmes, que le monde tolère, et que j’ai eu, je l’avoue, l’indignité d’encourager en vous citant mon exemple ! il s’agit d’un amour affreux, qui peut vous conduire à l’infamie, oui à l’infamie, parce que, aimer cette infernale créature, c’est aimer sciemment le vice, la dépravation et risquer d’arriver peut-être un jour au crime ;