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— À propos de notre mariage… avoue que tu as voulu me rouer ?

— Moi !… comment ?…

— Voici : il y a peu de temps, grâce à toi, mon mariage était arrêté avec Mlle de Francheville d’Ormon ; trois millions de dot, orpheline, un des plus grands noms de France !… c’était sortable… cinquante mille écus de rente… ça met à flot ; orpheline… ça ne gêne pas ; un grand nom… ça restaure… surtout quand on est petit-fils d’un gargotier de Clermont, le père au-ris-de-veau ; prononcez Du Riveau, par corruption ambitieuse et nobiliaire.

Quoique les sarcasmes sur l’origine de la famille, habitués d’ailleurs à Scipion, fussent particulièrement désagréables à l’orgueil du comte, trop inquiet des suites de l’entretien pour se fâcher, il reprit :

— Allons, je t’abandonne ton grand-père… l’aubergiste ; mets-le, selon ta coutume, à toutes sauces ; mais conclus… où veux-tu en venir ?

— Lorsqu’il s’est agi de ce riche mariage, je m’amusais alors (ce que tu ignorais), à jouer au parfait amour avec Raphaële Wilson.

— Toi ?..

— Oui, je la voyais chez sa tante, lorsque nous allions aux matinées de jeu de ce gros imbécile de Dumolard. Cet amour de pensionnaire me réveillait assez ; mais le mariage avec les trois millions, l’orphelinage et le grand nom, me plurent beaucoup ; je consentis donc à me marier selon ton désir ; ce qui ne m’empêcha pas, bien entendu, de continuer de faire ma cour à Raphaële Wilson… Tout-à-coup… tu tires la ficelle,… et