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bois, poussez de grands cris pour lui faire gagner la plaine…

— Soyez tranquille, je sens que je ferai bonne chasse et peut-être même coup double, en pinçant, par la même occasion, aussi ce gredin de braconnier, ce gueux de Bête-puante, qui m’a échappé jusqu’ici.

En entendant la menace dont le braconnier était de nouveau l’objet, le piqueur ne put dissimuler une légère inquiétude ; elle échappa au sous-officier, occupé de regarder le gendarme qui arrivait au galop.

Après un instant de silence, le piqueur reprit :

— En chasse, voyez-vous, Monsieur Beaucadet, il ne faut jamais chasser autre chose que l’animal de meute,… sinon, l’on revient bredouille, comme nous disons, nous autres veneurs. Aujourd’hui, contentez-vous de chasser le loup ; demain, vous chasserez le chat sauvage.

— Allons donc ! père Latrace ; pour un vieux routier, vous oubliez qu’en battue on tire tout ce qui passe à votre portée,… un lapin comme un cerf. Aussi que Bête-puante me passe, il goûtera de mes menottes. Je sais bien qu’on soutient ce gredin-là dans le pays, que ces traîne-la-mort de Solognaux l’aident à se cacher, et ne le dénoncent jamais, parce qu’on dit qu’il a des secrets pour les guérir de leurs fièvres, ces meurt-de-faim-là ! Mais Bête-puante a assez voltigé comme ça, il est temps de le mettre en cage.

À ce moment un cri d’oiseau, cri aigu, sonore, prolongé, partit de l’épais taillis qui bordait la lisière du bois.