— Je vous écoute, mon cher Monsieur Chandavoine, — dit M. Duriveau.
— Comme vous, Monsieur le comte, je passe condamnation sur les vices, sur la corruption de la basse classe… Seulement, en reconnaissant que le pauvre n’a aucun droit à exiger des secours du riche,… ne serait-il pas,… dans certaines circonstances données, et avec toute restriction,… ne serait-il pas, sinon du devoir, du moins de la politique du riche, de secourir le pauvre ?… à la charge du pauvre, bien entendu, de se montrer humble, soumis et reconnaissant de ce que le riche daigne faire pour lui…
— Sans doute la charité n’est pas légalement un devoir pour le riche, — dit l’ancien avoué ; — mais enfin… il y a quelque chose de vrai dans ce que dit Chandavoine.
— Oui, oui, — dirent plusieurs voix, — car il y a de bien méchants drôles parmi les pauvres.
— Et il faut prendre garde de les irriter.
— Qu’en pensez-vous, Monsieur le comte ?
— Ce que je pense, Messieurs, le voici, — répondit le comte de sa voix la plus acerbe, la plus tranchante, — non seulement la charité n’est pas un devoir pour le riche, mais la charité est chose stupide, dangereuse et détestable.
— La charité stupide, — s’écria l’un.
— La charité dangereuse, — s’écria l’autre.
— La charité détestable !! — s’écria celui-ci, et tous regardaient le comte avec stupeur.
— Oui, — répondit celui-ci d’un ton impérieux et absolu, — oui, la charité est stupide, oui, la charité