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et tout imprégnée de la senteur légèrement parfumée qu’exhale toujours l’entourage des femmes élégantes et recherchées.

Pour la première fois, depuis leur retour de la chasse, Mme Wilson et sa fille se trouvaient seules.

— Pauvre ange… tu souffres donc bien ? — dit Mme Wilson à Raphaële.

La jeune fille répondit par un douloureux soupir accompagné d’un regard chargé de larmes.

Mme Wilson prit entre ses deux petites mains la tête de sa fille, qui reposait sur son épaule, et la baisa plusieurs fois au front en disant :

— Toi souffrir,… mon ange,… toi,… oh ! je n’ai jamais jusqu’ici… ressenti la haine,… mais celui-là qui le causerait le moindre chagrin serait poursuivi par moi… d’une animosité terrible, implacable…

En parlant de la haine qu’elle éprouverait,… la vive et agaçante physionomie de Mme Wilson se transfigura ; ses yeux toujours si gais, si sereins, brillèrent d’un sombre éclat ; sa bouche, toujours si rieuse, se contracta ; les veines de son front se gonflèrent ; enfin, l’expression de son visage parut un instant si menaçant à Raphaële, qu’elle s’écria, épouvantée :

— Maman… ne le hais pas,… je l’aime tant…

À ces mots de Raphaële, qui disaient son incurable passion pour le vicomte Scipion Duriveau, Mme Wilson, par un brusque revirement, cacha sa figure dans ses mains et fondit en larmes.

— Mère,… mère chérie,… je te désole,… —