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L’agitation de Mme Perrine augmentait à chaque instant. Les divers incidents de ce jour, les souvenirs sur lesquels elle s’était tue, mais qui n’en avaient pas moins un grand retentissement dans son cœur ; les demi-aveux, le trouble de Bruyère, causaient à Mme Perrine une émotion extrême ; car, depuis sa guérison, sa vie s’était passée dans le calme, dans l’isolement le plus complet… Elle attribua donc aux singulières circonstances de cette soirée l’espèce d’étourdissement fiévreux, qu’elle ressentait depuis quelques moments.

— C’est là !… — lui dit Bruyère, en s’arrêtant dans l’angle formé par les deux pans de mur du fournil, et désignant l’orifice du four à Mme Perrine.

Celle-ci reprit ;

— La cachette est du moins bonne, en cela que l’on passerait mille fois à cet endroit… sans se douter de rien…

— Oh ! dame Perrine,… comme le cœur me bat, — dit Bruyère en tremblant ; — c’est là, pourtant.

— Croyez-moi, mon enfant… ne vous abusez pas d’un trop vif espoir… Mais, hâtons-nous ;… je ne sais si c’est la fraîcheur de la nuit, — ajouta Mme Perrine, d’une voix plus brève et en tressaillant, mais je frissonne de tout mon corps.

À peine elle avait prononcé ces mots, que Bruyère, avec l’énergie et l’agilité d’une fille des champs, s’arma d’un débris de solive, gravit les décombres, arriva près de l’orifice du four, en écarta le lierre et les ronces, et fit facilement une trouée à travers la maçonnerie de briques et de terre.