Page:Sue - Martin l'enfant trouvé.djvu/128

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— « Mais, — diront encore les optimistes et les repus qui, las des plaisirs de l’hiver, choisissent en gens sensés le printemps et l’été pour leurs pérégrinations champêtres, — que vient-on nous parler de tanières humides et insalubres, de landes solitaires et incultes, de marais pestilentiels ? Voici la métairie du Grand-Genevrier, par exemple… Eh bien ! c’est tout bonnement… ravissant… Cabat ou Dupré feraient de cela un délicieux tableau. »

Et, en effet, au printemps les bruyères incultes se couvrent de fleurs roses, au bord fangeux des marais se développent en gerbes les feuilles lancéolées des iris aux fleurs d’or, ou les tiges des grands roseaux à aigrettes brunes ; la mousse renaissante couvre de son velours et de ses reflets d’émeraude les tuiles et le chaume des toitures à demi effondrées ; les crevasses des masures en ruine disparaissent sous les plantes pariétaires, parmi lesquelles serpente le thyrse gracieux du liseron aux clochettes blanches et bleues. Enfin, les quelques grands chênes qui au nord abritent la métairie, sont d’une verdure luxuriante.

Alors, à la vue de ces masures réfléchies par l’eau stagnante du marais et enfouies au milieu des bruyères roses, des iris fleuris et des grands arbres verdoyants, l’optimiste crie au paysage ! à la fabrique… au pittoresque,… et il hausse les épaules de pitié, si on lui parle de l’horrible condition des gens condamnés à vivre dans un lieu qui, selon l’optimiste, ferait un si délicieux tableau.

Seulement, si l’optimiste amateur de couleur et de paysage prolongeait quelque peu son séjour dans