c’est qu’il n’y a rien de plus imprudent, de plus téméraire, pour une jeune femme chaste, que d’accepter les services d’un homme dans son intimité domestique.
Ce fait annonce, de la part des femmes, une confiance aveugle dans leur honnêteté, ou un mépris tout aussi aveugle pour ces hommes (ayant après tout, comme hommes, des passions, des instincts, des désirs) qu’elles exposent à toutes les familiarités d’une servitude bien dangereuse pour eux.
Il y a là un vague ressouvenir de cet axiome des dames romaines.
Un esclave n’est pas un homme.
Cela est faux.
Un homme est toujours un homme, et plus vous le supposerez dénué d’éducation, plus, en de tels rapports, sa sensation sera grossière, plus elle sera insolemment libertine, audacieusement lascive.
Dans sa pudeur si exquise, si délicatement ombrageuse, la femme doit à ce sujet s’inquiéter bien plus des pensées que des actes : sa dignité la défend contre toute tentative, mais sa dignité est impuissante à arrêter l’essor des pensées sensuelles, qu’à son insu elle provoque elle-même, qu’elle irrite elle-même, et cela matériellement, par mille incidents, involontaires, imprévus, de la familiarité domestique.
Et plus une femme sera pure, plus elle sera digne, plus elle aura conscience de l’abîme infini, de l’impossible qui la sépare de son valet, moins elle se tiendra en garde contre une liberté d’être, qui pourtant lui semblerait révoltante, s’il s’agissait d’être ainsi avec un homme de sa société, comme elles disent.