main ; de quelle voix émue ils m’auraient appelé leur ami peut-être !… Leur ami !… moi, pauvre enfant trouvé… pauvre laquais que je suis…
Oui, cela eût été doux à mon cœur et à mon orgueil !… Mais de ce que Just et Régina ignorent ce que j’ai fait pour eux, en suis-je pour cela moins leur ami ?… les ai-je moins conduit autant qu’il a été en moi dans la voie du devoir et de l’honneur ?
Voie souvent bien rude, bien douloureuse. Hélas ! qui le sait mieux que moi ? Oh ! oui, rude, douloureuse comme celle de tout calvaire… Mais une fois arrivé au sommet avec la lourde croix qu’on a long-temps portée… quel regard de mélancolique satisfaction l’on jette au loin… sur ce chemin si péniblement parcouru… et qui garde parfois les traces sanglantes de notre passage !
Ô Claude Gérard, mon maître, mon ami… merci de tes enseignements, de tes exemples… Ils m’ont donné la force et le courage de le gravir… ce cruel calvaire…
Non, non, cette tentation de tout révéler à Just et à Régina était une pensée mauvaise…
Mon orgueil me rendait injuste… M. de Montbar a souffert aussi lui, cruellement souffert… Si sa douleur a manqué de dignité, n’est-ce pas là une des conséquences de la funeste éducation qu’il a reçue… éducation que trois mots résument :
Orgueil. — Richesse. — Oisiveté.