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Maintenant, Monsieur, supposez que ces preuves… je les mette entre vos mains.

— Ces preuves ? entre mes mains, — dit le prince, et il semblait ne pas croire à ce qu’il entendait.

— Oui, — lui dis-je, — entre vos mains ; supposez ensuite qu’armé de cette réhabilitation d’un si grand prix pour Mme de Montbar, vous rentriez tout-à-l’heure à votre hôtel, demain matin vous faites demander à Mme de Montbar à quelle heure elle peut vous recevoir.

— C’est un rêve, — murmurait le prince étourdi, — c’est un rêve !

— Vous pouvez le réaliser, Monsieur. Je poursuis ma supposition : vous vous présentez chez Mme de Montbar, et vous lui dites à-peu-près ceci… ou beaucoup mieux, j’en suis certain : « Madame, je sais le prix que vous attachez à la réhabilitation de la mémoire de votre mère ; cette réhabilitation, la voici : (et vous remettez à Mme de Montbar le portefeuille que je vous ai confié). En vous donnant, Madame, les moyens de prouver l’innocence de votre mère, je n’atténue en rien mes torts passés envers vous ; ils sont grands, je le reconnais ; impardonnables… je le crains, car vous n’en connaissez pas la nature ; vous avez surpris mes absences nocturnes, vous avez cru qu’il s’agissait de quelque infidélité ; non, Madame, c’était pis encore, puisque je n’ai pas osé tenter de me justifier… loin de là, j’ai accueilli vos reproches touchants avec hauteur et dédain… Ce que je n’ai pas osé vous avouer alors, de crainte de m’aliéner votre affection… je puis vous le dire aujourd’hui… Malheureusement je n’ai plus rien à perdre… » — Et alors, Monsieur,