Maintenant je vous crois… et, quoi qu’il advienne de notre rencontre, j’honorerai toujours dans ma pensée l’homme loyal qui a bien voulu me faire entendre ce langage sévère.
— Je vous parle ainsi, Monsieur, certain d’être compris et de vous être utile. Ce n’est pas, croyez-le, pour le vain plaisir de moraliser… Je vous ai soumis cette idée, parce que cette idée réalisée peut vous être d’un secours pratique pour sortir de votre cruelle position…
— Je vous en prie, expliquez-vous, Monsieur.
— Votre intérêt exige que je vous expose votre situation sans ménagements. Vous avez perdu, par votre faute, l’affection si vive, si dévouée de Mme de Montbar.
— Il n’est que trop vrai, — me dit le prince avec un profond soupir.
— Vous aimez cependant encore votre femme avec idolâtrie.
— Oui… avec idolâtrie… Monsieur… avec idolâtrie…
Et il me sembla que des larmes altéraient la voix du prince.
— Mme de Montbar, vous devez le savoir, Monsieur, est incapable d’une trahison ; jamais elle ne descendra à vous tromper. Mais un jour viendra, et il est proche, où elle vous dira : « — Vous avez tué l’amour que j’avais pour vous… depuis long-temps je ne vous aime plus ; je n’ai, jusqu’ici, aucun reproche à me faire ; mais la vie m’est désormais impossible avec vous. Séparons-nous donc sans éclat, sans scandale, et reprenons chacun notre liberté. »