nous engagèrent à quitter le bal par prudence, et protégèrent notre retraite lorsque nous eûmes payé notre écot et le tabouret cassé.
Ce dénoûment me satisfit pleinement. J’avais craint un instant de me voir arrêté avec le prince ; il eût été obligé de donner son nom, et s’il avait fallu à mon tour me nommer… dans quel mortel embarras me serais-je trouvé !
Du reste, je savais ce que j’avais voulu surtout savoir : le prince aimait encore passionnément sa femme ; l’orgueil et la crainte du ridicule l’avaient sans doute empêché d’avouer cette jalousie à Régina et de tenter d’obtenir son pardon ;… M. de Montbar cherchait enfin un étourdissement à ses chagrins dans une dégradation honteuse.
Une seule chose pouvait m’intéresser à lui : la constance de son amour pour Régina… la persistance de ce sentiment me prouvait que son cœur n’était pas complètement perdu ; j’avais d’ailleurs tant souffert… je souffrais encore presque des mêmes peines que, plus que personne, je devais compatir à de pareils chagrins ; mais l’orgueil de M. de Montbar, sa mauvaise honte, l’ignoble diversion qu’il cherchait à ses tourments, ne m’inspiraient qu’une dédaigneuse pitié… Cet homme, même amoureux, ne m’offrait aucune garantie, aucune sécurité pour le bonheur à venir de Régina ; j’avais au contraire une foi extrême dans le caractère, dans l’esprit, dans la valeur personnelle de Just ; aussi, ayant en mon pouvoir le moyen presque certain de lever le dernier scrupule qui empêchait Régina de quitter son mari, et de la décider aussi à confier sa destinée à l’amour de