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Claude Gérard, Sire, vous a aussi montré comment ceux qui gouvernent la France ont entendu et entendent l’éducation du peuple des campagnes qui compose l’immense majorité de la nation ; vous avez vu, Sire, de quel bien-être, de quelle considération, de quels honneurs ils entourent l’instituteur.

» Qu’il y ait quelque solennité, quelque cérémonie publique… qui voit-on au premier rang ? le magistrat qui tient le glaive de la loi, le général qui tient le glaive de la force armée, le prêtre qui tient le glaive de la justice divine ; ceux-là représentent le triste appareil des punitions humaines et divines, — la compression — la répression — l’intimidation — dans ce monde et dans l’autre.

» Mais parmi ces pompeux cortèges, au même rang que ces hommes qui jugent, qui punissent, qui compriment, pourquoi ne voit-on jamais cet homme non moins important dans la société que le magistrat, que le soldat, que le prêtre ? cet homme enfin qui devrait être honoré au moins à leur égal : — l’instituteur du peuple ?

» Oui, l’instituteur du peuple ; celui-là qui doit créer moralement le citoyen, l’instruire, l’améliorer, lui inspirer l’ardent et saint amour de la patrie et de l’humanité, le préparer à l’accomplissement de tous les devoirs, de tous les sacrifices qu’impose une vie laborieuse et honnête.

» Encore une fois, ces instituteurs qui exercent le plus sacré des sacerdoces, celui d’éclairer, de moraliser le peuple, ne devraient-ils pas marcher les pairs de ceux-là qui, si le peuple faillit, le jugent, le sabrent ou le damnent ?