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La température de cette cave humide et sombre était presque tiède ; lorsqu’après la première nuit passée dans une sorte de torpeur du corps et de la pensée, je vis poindre la pâle lueur du matin à travers la voûte de mon réduit, j’éprouvai, chose étrange ! une sorte de jouissance à me dire : Je ne sortirai pas… de la journée. Je n’aurai à m’inquiéter ni de mon pain, ni d’un asile…

Ce jour, je le passai dans une immobilité calculée, car j’y trouvai bientôt un froid et complet engourdissement ; le visage tourné vers le mur de la cave, les yeux fermés, je m’absorbai dans le ressouvenir du passé.

Cette longue méditation fut comme un tendre et solennel adieu, adressé du plus profond de mon cœur à tous ceux que j’avais aimés…

Bamboche… Basquine… Claude Gérard, Régina furent tour à tour évoqués par ma pensée de plus en plus affaiblie, car, sur le soir de ce jour, je commençai d’éprouver les douloureuses étreintes de la faim ; heureusement elles réagirent presque aussitôt sur mon cerveau déjà très-épuisé…

De ce moment je dus être en proie aux hallucinations qui accompagnent toujours ce terrible paroxysme appelé le délire de la faim ; et je perdis la conscience de ce qui m’arriva.

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Lorsque je revins à moi, le jour paraissait à peine, j’étais couché sur un lit de sangle, dans une sorte de soupente, d’où je découvris au-dessous de moi, une très-longue écurie, remplie de trente ou quarante chevaux.

Je croyais rêver, je regardais autour de moi avec une surprise croissante, lorsque j’entendis monter à l’échelle