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ma stupeur en entendant une voix, un chant, des paroles trop connues de moi !

Cette voix était celle de la Levrasse.

Il fredonnait les paroles de la Belle Bourbonnaise, air que le saltimbanque aimait de prédilection…

Tout en chantant, il frappa à la porte, absolument comme avait déjà frappé le visiteur précédent, avant de glisser sous la porte le billet dont j’ai parlé.

N’obtenant aucune réponse, la Levrasse suspendit un moment sa chanson et frappa de nouveau… puis une autre fois encore avec impatience… alors, convaincu sans doute de l’absence du cul-de-jatte, mon ancien maître s’éloigna en répétant son refrain favori.

Cette rencontre inattendue me frappa de stupeur ; mais je ne fus nullement étonné des rapports qui pouvaient exister entre la Levrasse et le cul-de-jatte, tous deux si bien faits pour s’entendre ; l’aversion que m’inspirait l’ancien bourreau de mon enfance échappé sans doute à l’incendie de sa voiture, allumé par Bamboche, m’était un nouveau motif de fuir cette demeure, craignant à chaque instant une descente de la police ; dans ce cas, malgré mes protestations, je devais, aux yeux les moins prévenus, passer pour le complice du cul-de-jatte et être jeté en prison comme voleur, quitte à prouver plus tard mon innocence… Cet avenir me paraissait bien autrement redoutable que d’être arrêté pour fait de vagabondage…

De plus en plus déterminé à user de la force pour sortir, je pris, à tout hasard, parmi les armes anciennes, une espèce de masse en fer damasquiné, moins pour en