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En entrant chez son père, la physionomie du capitaine Just était souriante, épanouie ; il ignorait tout, profitant d’une interruption de quelques jours dans ses travaux, il se croisait avec la lettre qui lui apprenait la position alarmante du docteur.

Par une fatalité déplorable, Suzon, occupée dans sa chambre, avait ignoré l’arrivée du capitaine ; celui-ci avait été reçu par le fils du portier de la maison voisine. Ce jeune garçon, depuis les événements de la veille, était, pour plus de sûreté, resté dans notre demeure. Abasourdi par la brusque arrivée du capitaine Just, n’osant le prévenir du triste spectacle qui l’attendait, il s’était borné à lui dire que M. le docteur était couché ; comme il était assez tard, le capitaine Just n’avait conçu aucune inquiétude.

Mais au moment où il entra, et où le vieillard, saisi de joie, s’écriait : — Mon fils ! — Suzon instruite alors du retour subit du capitaine, et craignant que sa présence ne causât une dangereuse émotion au vieillard, accourait, pâle, haletante, effrayée… afin de le préparer au moins à cette entrevue.

Il était trop tard…

L’apparition de la vieille servante, son air alarmé, la douloureuse altération des traits du docteur éclairèrent soudain le capitaine, et il se jeta dans les bras de son père avec une angoisse profonde.

Après un silence de quelques instants, durant lequel le père et le fils étaient demeurés étroitement embrassés, tandis que Suzon et moi nous contenions à peine nos larmes, le docteur dit d’une voix faible, mais tranquille :