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difficile, on l’eût dit oppressé par une horrible suffocation.

Nous regagnâmes ainsi la voiture, le docteur y monta, après avoir donné au cocher l’adresse de l’hôtel de Montbar

— Mon Dieu, Monsieur, — m’écriai-je alarmé, — qu’avez-vous ?

Sans me répondre, mon maître me prit le bras et me repoussa doucement ; je crus comprendre la signification de ce geste, j’attendis en silence la fin de la crise à laquelle mon maître était en proie.

Dès lors je pressentis vaguement que je venais d’être témoin de l’un des accès de cette maladie incurable, dont le docteur se disait certain de prochainement mourir.

Peu-à-peu, cependant, sa respiration devint moins difficile, sa pâleur diminua, il me parut moins souffrir. Alors, ne pouvant contraindre plus long-temps mon admiration, en songeant à la généreuse action dont je venais d’être témoin, et à tant d’autres que le hasard m’avait révélé :

— Ah ! Monsieur ! — m’écriai-je, — je comprends maintenant que vous fassiez si impitoyablement payer les riches !

Le docteur Clément, sans me répondre, me fit signe de garder le silence ; il appuya sa tête sur l’un des côtés de la voiture, ferma les yeux, et resta sans mouvement, comme s’il se fût senti brisé, anéanti.

J’examinais en silence cette figure d’un caractère si puissant, si énergique, ce grand front sillonné par tant d’années d’étude et de méditations, cette bouche au con-