passion servait trop nos projets et l’inexorable haine que Basquine avait vouée à la race des Scipions, ainsi qu’elle disait, pour que notre compagne ne parût pas encourager l’amour insensé qu’elle inspirait. Elle berça le comte des plus ardentes espérances, et tous deux échangèrent une correspondance passionnée qui, révélée à M. de Noirlieu, devait être une arme terrible contre Robert.
Cet homme se vengea d’ailleurs cruellement de moi, car non-seulement je faillis succomber à la blessure que j’avais reçue, la balle m’ayant traversé les muscles du cou, mais je faillis être aveuglé par l’explosion de ce coup tiré à brûle-pourpoint ; pendant près d’une année je fus complètement privé de la vue.
En suite de cette lutte avec Robert, les agents de police, venus pour arrêter Bamboche qui leur échappa, me ramassèrent baigné dans mon sang à quelques pas du comte de Mareuil qui s’était fait sauter la cervelle, et je fus transporté à l’Hôtel-Dieu.
Lorsque je revins à moi, couché dans un lit de cet hôpital, j’avais les yeux couverts d’un bandeau. À un mouvement que je fis pour ôter ce linge, un infirmier qui me veillait sans doute, me dit :
— Ne cherchez pas à ôter ce bandeau, mon garçon, vous n’y verriez pas plus clair.
— Il est donc nuit ?… où suis-je ?
— Vous êtes à l’Hôtel-Dieu, et il fait grand jour.
— Alors, pourquoi ne verrais-je pas clair ?
— Parce que vous êtes aveugle.