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qu’il proclama dès ce jour la plus grande tragédienne lyrique de notre temps, que cet article excita une attention, une curiosité universelle ; et la foule… mais une foule des plus choisies, se porta aux Funambules.

Le directeur, ébloui de ce succès inattendu, courut supplier à mains jointes la pauvre figurante qui n’avait pas osé reparaître au théâtre, de venir y reprendre son rôle du mauvais génie. Lorsque Basquine reparut, ce fut un enthousiasme général, une véritable ovation. Car, chose peu commune, le talent incontestable de Basquine se trouvait à la hauteur des éloges presque hyperboliques qu’en avait publiés l’ami de Balthazar ; une fois l’attention publique éveillée sur ce nouveau prodige dramatique, la presse se fit l’écho des louanges que l’on décernait à la jeune actrice. Enfin Balthazar, fidèle à ses promesses, publia dans le journal de son ami le critique, une Épître à Basquine

Chose étrange, cette épître, véritable chef-d’œuvre, étincelante de verve et d’esprit, sublime d’enthousiasme, et remplie de la plus touchante mélancolie, de la plus noble émotion, alors que le poète racontait la lutte douloureuse, incessante, d’une jeune fille de seize ans, pauvre, inconnue, isolée, sans appui, ayant à surmonter les obstacles sans nombre dont sont hérissés les abords du plus obscur théâtre, cette épître ici, saisissante comme un roman, ou tendre comme une élégie, ailleurs amère et incisive comme une satire, plus loin folle, bizarre et hardie comme un rêve fantastique ; cette épître enfin, généreuse comme une bonne action, fut aussi pour Balthazar le signal d’un succès étourdissant… Son talent, jusqu’alors seulement connu de