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ce Corso, dont la figure à la fois efféminée et basanée, les yeux noirs, perçants, profondément charbonnés, m’inspiraient une vague répulsion. — « Si Mademoiselle veut me suivre, — me dit-il respectueusement en me prenant par la main, — je vais la conduire auprès de Monseigneur. » — Et Corso me fit traverser un premier salon, puis une espèce de boudoir complètement lambrissé de glaces, dont le plafond était en glaces, ainsi qu’une partie du parquet ; Corso toucha à un ressort que je n’aperçus pas, un panneau de glace glissa dans une rainure, et tenant toujours mon guide par la main, je le suivis avec une inquiétude croissante dans un corridor complètement obscur, et garni d’épais tapis où s’amortissait le bruit de nos pas. Au bout de quelques minutes, une porte s’ouvrit, Corso me poussa légèrement devant lui, et lorsque je me retournai vivement vers mon conducteur, il avait disparu, et il me fut impossible de reconnaître par quelle issue j’étais entrée. De ma vie, je n’oublierai cette scène : Je me trouvais dans une espèce de rotonde toute tendue de draperies noires semées de larmes d’argent et éclairée par une lampe funéraire aussi en argent ; la senteur pénétrante des parfums les plus suaves et les plus violents remplissait cette pièce sépulcrale, meublée d’une sorte de banc circulaire en ébène poli, sans oreillers ni coussins. Au milieu de la rotonde était une table recouverte d’un tapis de velours noir, brodé d’argent comme la housse d’un cercueil ; sur cette table je vis un petit ménage comme disent les enfants, mais un petit ménage d’une magnificence incroyable ; toutes les pièces de ce service en miniature étaient en or, rehaussé d’émail et de pierres fines ; je remarquai