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d’abord adressé, m’avaient accueilli avec une grossièreté menaçante ; mais je n’avais pas vu parmi eux ces types à la fois dégradés, effrayants, si nombreux parmi les malheureux qui se pressaient à la descente du bateau à vapeur ; je reconnus la vérité de l’observation du maître du garni à l’endroit de ces hommes, dont la plupart, m’avait-il dit, étaient malfaiteurs ou repris de justice.

M’approchant d’un homme qui me parut plutôt un désœuvré qu’un habitué du débarcadère, je lui demandai si les bateaux à vapeur abordaient journellement à cet endroit ; il me répondit que chaque jour il arrivait un paquebot le matin et qu’il en repartait un autre le soir. Ce dernier renseignement m’intéressait peu, car en quittant Paris, les voyageurs envoyaient leurs bagages par les commissionnaires des hôtels. La descente du bateau du matin m’offrait seule quelque chance de salaire, à la condition d’entrer en lutte ouverte avec mes sinistres concurrents.

Et pourtant, à cette pensée, malgré mes pressants besoins, j’éprouvais un dégoût insurmontable.

Je regardais tristement autour de moi, lorsqu’au milieu d’un des groupes de gens qui n’avaient rien pu transporter j’aperçus le cul-de-jatte… bientôt accompagné d’un autre homme à figure sinistre et d’un enfant de quinze ans, il quitta le débarcadère et remonta sur le quai.

Cédant à un mouvement presque involontaire… je suivis ce bandit… Peut-être allait-il retrouver Bamboche.